Moins d’un mois après l’adoption de la nouvelle constitution marocaine qui reconnaît le droit de vote et l'éligibilité des Marocains résidant à l’étranger, des cadres marocains expatriés ont annoncé leur intention de créer un parti politique. «La Coalition pour la patrie», tel est le nom de leur formation qui devrait dans les trois à quatre prochains mois se rajouter à la trentaine de partis qui composent l’échiquier politique du royaume. Au sein de cette «Coalition pour la patrie», environ 130 personnes s'activent : des cadres pour la plupart, dont des élus locaux en Europe, d’origine marocaine.
«Depuis l’indépendance, la scène politique marocaine est composée uniquement de partis formés par des Marocains qui vivent au Maroc et qui pratiquent la politique principalement au Maroc. Là, c’est la première fois qu’un parti politique est créé par des cadres qui vivent à l’étranger», déclare Said Ida Hassan, président de la Commission préparatoire du parti. «La Coalitionmer pour la patrie a une nouvelle conception de la pratique politique au Maroc», ajoute cet ancien journaliste de l'agence officielle marocaine (MAP) et qui édite aujourd'hui le journal gratuit destiné aux Marocains d’Espagne, «Andalus Press». Si on peut s'interroger sur l'utilité d'un enième parti alors que les électeurs ont déjà du mal avec les nombreux existants, des doutes plannent sur sa conformité avec la Constitution qui précise qu'un parti doit représenter tous les Marocains et non seulement une partie.
La nouvelle constitution dit vouloir intégrer les MRE dans la vie politique, dans un soucis de démocratie, en leur accordant le droit d'être éligible notamment. Pourtant, la principale raison d'exister de ce parti c'est le statut «de résidant à l'étranger». Pour ce qui est de leur idéologie, elle reste vague. «Notre parti se positionne au Centre», répond Said Ida Hassan, pour qui les militants de tous bords sont les bienvenus. «Notre idéal est que les immigrés marocains, de différentes idéologies, peuvent collaborer pour un projet sociétal d’un pays démocratique et moderne». Le programme lui aussi reste à définir : la Coalition pour la patrie ambitionne de «s'attaquer à tous les problèmes» rencontrés par les Marocains de l'étranger. Mais pour l'heure, la principale préoccuaption des membres de la Commission préparatoire, c'est d'abord la question relative à la représentativité des MRE au Parlement même si leur formation devrait ne pas participer aux prochaines législatives dont la date reste encore indéterminée.
Un parti pour et par les MRE pour un Maroc démocratique et moderne
Réelle étape dans un processus de démocratisation ou baromètre d'un dysfonctionnement plus profond ? Pour le professeur universitaire et chercheur en migration, Abdelkrim Belguendouz, la création d’un parti des Marocains de l’étranger démontre que «sur le plan institutionnel, ni l’Etat, ni les partis politiques n’ont assumés leurs responsabilités». Il est normal donc qu’une fraction de cette communauté «se lève pour réclamer ces droits politiques». Quant à la question de savoir si ce parti pourra fédérer les MRE, le chercheur préfère ne pas se prononcer.
Reste à savoir si la Coalition pour la patrie parviendra à convaincre les près de 5 millions de Marocains résidant à l’étranger. Parviendront-ils à les sensibiliser à des problèmes auquels nombre d'entre eux ne sont pas confrontés ni de près ni de loin ? Le faible taux de participation des MRE au dernier scrutin référendaire (moins de 10%) ne plaide en tout cas pas en faveur de ce nouveau parti.