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Maroc: les nouveaux droits des femmes tardent à s'imposer

Adopté il y a un an, le code marocain de la famille qui a réformé en profondeur le droit des femmes fait face à des difficultés de mise en oeuvre, des associations féminines dénonçant notamment le "conservatisme" des juges.

"Je suis déçue. L'application du code de la famille est défaillante. Les juges ont cette réforme entre les mains or, certains d'entre eux, conservateurs, n'en respectent pas les principes de base", déclare à l'AFP Fouzia Assouli, présidente de la Ligue démocratique des droits de la femme (LDDF).

La LDDF et plusieurs autres associations féminines s'étaient félicitées de l'adoption du nouveau code le 9 février 2004, le qualifiant souvent de "révolution pour la femme marocaine". Ce texte place la famille "sous la responsabilité conjointe des deux époux", porte à 18 ans au lieu de 15 ans l'âge légal du mariage des femmes et pose de sévères conditions à la répudiation comme à la polygamie.

"La polygamie ne devrait normalement être autorisée que dans des cas exceptionnels. Pourtant, un juge a dernièrement accepté qu'un homme prenne une seconde femme sous prétexte que son épouse était vieille !", s'indigne Fouzia Assouli.

Certains adouls (notaires) "continuent d'exiger qu'un tuteur accompagne la femme qui vient se marier, ce qui est contraire au nouveau code de la famille", poursuit-elle.

"Les juges sont en sous-effectifs!", déplore par ailleurs Mme Assouli, qui assure que le nombre de dossiers a "sensiblement" augmenté depuis l'entrée en vigueur du code de la famille.

Le manque de médiatisation du nouveau code est une autre "faille", selon Mme Assouli, estimant que "dans le monde rural surtout, les femmes sont mal informées de leurs nouveaux droits et les médias publics ne jouent pas leur rôle".

Latifa Jbabdi, présidente de l'Union action féminine (UAF), est plus indulgente : "Nous sommes dans une phase transitoire. Il va falloir plus d'un an à cette loi pour se mettre en place", assure-t-elle.

Les résultats sont "pour le moment irréguliers, l'application de la loi dépend des régions comme des magistrats", estime-t-elle, assurant qu'il faut "mettre en place une formation plus pointue des juges".

Pour le ministère de la Justice, l'une des priorités est d'"uniformiser" l'application du nouveau code de la famille. Dans cet objectif, des magistrats ont été formés pour travailler dans les "sections famille" créées au sein des tribunaux du royaume.

Les juges déjà en activité, affectés depuis un an au Tribunal de la famille, peuvent pour leur part assister à des séminaires de formation continue. Il y en a eu trois ou quatre en un an, indiquent des magistrats. "Il faut laisser un temps d'adaptation aux juges", a déclaré l'un d'eux à l'AFP.

Des guides présentant les articles de la nouvelle loi ainsi que des explications ont en outre été distribués aux magistrats et sont vendus aux professionnels.

Le ministère de la Justice s'apprête par ailleurs à distribuer des dépliants expliquant la réforme au grand public. Il y aura ainsi une dizaine de fascicules, en arabe et en français, chacun étant consacré à un aspect de la réforme. L'un d'entre eux présentera les différentes formes de dissolution de mariage prévues par le texte.

Pour le magazine Femmes du Maroc, la réforme du code de la famille a "fait beaucoup de bien" et si les Marocaines ne bénéficient pas encore de "l'égalité parfaite", "dans le contexte actuel (...) nous avons obtenu le maximum". Mais "il y a encore du boulot", conclut le mensuel féminin.

Source : AFP

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