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Otages : Al-Jezira, la messagère


C'est la première à l'avoir annoncé. Partout dans le monde arabe et en Occident, c'est une fois de plus la chaîne d'information en continu al-Jezira qui a donné la nouvelle de la libération des otages hier après-midi. Il faut dire que la chaîne a joué pendant ces quatre mois un rôle actif dans cette affaire. C'est par elle que sont parvenues les premières images des otages Christian Chesnot et Georges Malbrunot sur une cassette «proba- blement remise à un contact en Irak, puis transmise à Doha par satellite».


Mais la chaîne ne s'est pas arrêtée à la diffusion de cette première cassette. Rompant avec sa sacro-sainte ligne éditoriale qui exige l'absence de tout commentaire et la mise en avant des seuls faits, al-Jezira s'est engagée. Dès le lendemain de la prise d'otage et durant les quatre mois qu'a duré cette prise d'otages, al-Jezira a pris position en faveur des journalistes français et de leur libération. Celle qui a la confiance des ravisseurs et en général des tendances les plus dures de l'islam a, dans un premier temps, tenté d'isoler les responsables de l'enlèvement et de les convaincre qu'il s'étaient «trompés de personnes».


Moins de 48 heures après l'annonce, le siège de la chaîne sollicite son bureau parisien et consacre 10 minutes de ces journaux aux réactions en France. Le lendemain, elle doublera même le temps consacré au sujet, relayant tous les grands leaders de l'islam.


Mieux encore, elle réclame la «libération immédiate des deux reporters» afin qu'ils remplissent «leur mission en transmettant la vérité au public de par le monde» et souligne «la nécessité de garantir la liberté des journalistes dans les zones de guerre». Une allusion bien sentie à sa propre expérience puisque, à Kaboul et à Bagdad, ses bureaux ont été bombardés faisant une victime parmi les journalistes de la chaîne.


Résultat, lorsque le premier ultimatum arrive à son terme, al-Jezira a atteint son objectif : retourner une opinion publique arabe qu'elle façonne en partie, isoler et discréditer les ravisseurs. Les jours et les semaines suivantes, elle poursuivra alors sa couverture. Allant jusqu'à ouvrir son antenne à Michel Barnier, le ministre français des Affaires étrangères, et lui permettant de s'expliquer notamment sur l'affaire du voile à l'origine des revendications des ravisseurs. La suite se passera à Bagdad, sur le terrain purement diplomatique. Mais la première chaîne panarabe d'information qui bénéficie d'une notoriété qu'aucun autre média n'a encore entamé continuera tout au long de ces quatre mois à évoquer la situation des otages, entretenant ainsi l'idée d'une nécessaire libération.


Par ses débats où les téléspectateurs interviennent, ses émissions sur l'Islam qui n'épargnent aucun tabou, ses reportages souvent piquants sur les régimes arabes, Israël ou la politique étrangère américaine, al-Jezira dit tout haut ce que la rue arabe pense tout bas. Mais il ne faut pas non plus oublier que la chaîne satellitaire est une télévision d'Etat, celle du Qatar. Ce dernier tenant à jouer un rôle diplomatique. Nul doute que, dans cette affaire, elle aura bénéficié de l'assentiment des plus grands du royaume qatariote.


Source: Le Figaro

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