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La vérité sur l'affaire Hannibal Kadhafi

Qui est intervenu pour obtenir la libération des otages marocains ? Le frère de l'employé est-il toujours séquestré en Libye ? Pourquoi nos officiels n'ont pas réagi ? Début de réponse.

La mère et le frère du chauffeur marocain à l'origine de la plainte déposée en Suisse contre Hannibal, fils du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, ont été libérés mercredi dernier. Il y a quelques semaines, le chauffeur marocain a déposé plainte contre son employeur (Hannibal) pour coups et blessures. Résultat : une mini crise diplomatique entre la Libye et la Suisse, qui avait procédé à l'arrestation du fils du colonel Kadhafi. A Tripoli, les autorités ont presque immédiatement arrêté la mère et le frère de l'employé marocain d'Hannibal Kadhafi. Un moyen de pression comme un autre pour obtenir l'annulation de la plainte. Aujourd'hui, et si la mère a effectivement foulé le sol marocain, l'avocat suisse du plaignant marocain affirme ne pas avoir de nouvelles du frère de son client, également retenu en Libye. «Aux dernières nouvelles, il était en Libye. Nous ne savons pas s'il continue à se cacher, s'il est détenu ou s'il est arrivé à s'enfuir», a déclaré Maître François Membrez à l'Agence France presse. Contacté par «Le Soir échos», l'avocat confirme que son client n'a pas de nouvelles de son frère.

Paradoxalement, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement Khalid Naciri assure que les deux Marocains sont bien rentrés au pays. «La dame et son fils sont rentrés. C'est désormais une affaire entre la Suisse et la Libye. Il n'y a pas lieu d'impliquer le Maroc, insiste Naciri. Soit, mais ce n'est pas la seule zone d'ombre dans cette affaire compliquée. François Membrez continue d'affirmer que la mère et le frère de son client ont bien été retenus en Libye contre leur gré, alors que la version officielle marocaine reste évasive sur cette question. «Certes, la mère de mon client a été bien traitée par les autorités libyennes, mais elle n'en était pas moins privée de sa liberté, depuis son arrestation à l'aéroport de Tripoli le 15 juillet 2008», déclare l'avocat. Khalid Naciri se contente, pour sa part, d'affirmer «ne pas avoir d'information sur ces détails». Un observateur va jusqu'à dire que le prix de cet heureux dénouement est peut-être le silence du Maroc sur le fait qu'il y ait eu séquestration arbitraire de l'un de ses ressortissants. Se pose alors une question. Comment cette «libération» a-t-elle pu être obtenue, surtout que la diplomatie officielle du royaume ne s'est à aucun moment manifestée ? «Nous préférons une approche discrète et efficace à la diplomatie du spectacle. Nous avons d'excellentes relations avec la Libye et nous entendons les préserver. Nos efforts ont finalement porté leurs fruits», explique Khalid Naciri, refusant de donner les détails des discussions engagées entre les deux capitales. Selon une source qui préfère garder l'anonymat, ce serait un cadre du ministère des Affaires étrangères marocain qui aurait mené les tractations de manière secrète.

L'avocat du plaignant assure avoir contacté les responsables marocains ainsi que le Haut commissariat aux droits de l'Homme pour débloquer l'affaire. «A aucun moment les autorités marocaines ne m'ont rappelé. Ces toujours moi qui l'ai fait. J'ai également saisi les Nations Unies, car il s'agit d'un cas de détention arbitraires», affirme maître Membrez, qui tient cependant à préciser que c'est «grâce aux efforts du Maroc que cette libération a pu être obtenue». Signe que l'affaire dérange les hautes sphères du royaume, un article particulièrement virulent publié par un quotidien proche du Palais. L'éditorialiste y accuse l'avocat de «s'agiter dans l'affaire Hannibal» et de «se démener pour conférer à une affaire judiciaire (...) un caractère véreux». L'avocat répond : «Je ne comprends pas cet article. Je ne me suis jamais agité. Je ne fais que représenter mes clients», se défend Maître Membrez, qui écarte totalement la possibilité de porter plainte contre le quotidien en question. Pour rappel, deux employés du couple Kadhafi, un Marocain et une Tunisienne, ont porté plainte contre leur employeur pour mauvais traitement, déclenchant une crise diplomatique entre la Suisse et la Libye. Hannibal Kadhafi et sa femme nient les accusations de leurs domestiques. Ils ont été libérés sous caution, mais la plainte est toujours en cours, comme le confirme l'avocat des plaignants. Affaire à suivre.

Zakaria Choukrallah
Source: Le Soir Echos

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