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Station Saïdia: Les écologistes tirent la sonnette d’alarme

La méga-station de Saïdia, inscrite dans le cadre du plan Azur 2010, est en train de prendre forme. Les premières unités hôtelières, résidences touristiques et villages de vacances seront livrés au cours de cette année. Toutefois, parallèlement à l’avancement des travaux, le chantier ne cesse de soulever de vives controverses, notamment au sein des écologistes.

En effet, de nombreuses voix s’élèvent, dénonçant les dégâts causés à l’environnement. Certains accusent même le groupe Fadesa, aménageur du projet, de ne pas tenir compte de ce volet de la question. Le groupe, aujourd’hui passé sous la coupe de Martinsa (cf. www.leconomiste.com), suscite plus que jamais la colère des environnementaux de la région de l’Oriental. Le groupe Fadesa n’a pas donné suite à nos multiples requêtes.

Mohamed Benata, président de l’association Espace de solidarité et de coopération de l’Oriental. Cet ingénieur agronome ne mâche pas ses mots. «L’arrachage des arbres de la forêt et des plantes végétales aura un impact négatif sur les zones des plages et des dunes marines», affirme-t-il. D’ailleurs, il n’hésite pas à qualifier ce projet «de crime contre la nature». Par ailleurs, il rappelle que, selon la législation marocaine, les plages et les zones de dunes marines sont à usage exclusif du public. Aussi, insiste Benata, doivent-elles être respectées et protégées. Toute construction privée ou projet touristique doivent être éloignés de la ligne du rivage.

Zoulikha Irzi, professeur à la faculté des sciences d’Oujda, appuie ces déclarations. Si le projet de la station balnéaire a un impact positif en matière de développement socioéconomique, des effets négatifs se manifestent malheureusement sur le littoral. Notamment le bas de plage, le rivage, la haute plage, le piedmont nord des falaises de Oulad Mansour. Les conséquences, précise l’océanologue, sont écologiques et sédimentologiques. Pour elle, la disparition de la juniperaie ne permettra plus d’assurer l’équilibre naturel du littoral qui abritait de nombreuses espèces de la biodiversité, ni jouer le rôle de barrière contre la déflation du sable vers le continent. «Par ailleurs, l’emplacement du port et l’expansion de ses deux jetées constituent une double nuisance. En effet, 7 km de côtes sont menacés par un fort recul et les flux sédimentaires drainés à l’intérieur provoquent un ensablement excessif qui nécessitera des opérations de dragage fort onéreuses», ajoute Irzi.

Pour Abdelkader Sbai, chef de département géographie à la faculté des lettres à Oujda, le littoral est un espace à valoriser, mais à condition de l’aménager de manière rationnelle et en tenant compte de sa fragilité. «Le projet Fadesa est en train de se réaliser sans études scientifiques préalables et les impacts risquent d’être multiples. Il faut les contenir», affirme le spécialiste.

Mohammed Bedhri, professeur à la faculté de droit, estime, lui, que tout projet, quelle que soit sa dimension, devrait être inscrit dans une perspective de développement durable. «Aussi, Fadesa doit respecter les normes de protection de l’environnement tant au niveau du littoral qu’en ce qui concerne les impacts sur l’écosystème, conformément à la loi sur les études des impacts dans l’attente d’un projet de loi sur le littoral». Et d’ajouter que «toutefois, il n’y a aucune incompatibilité entre développement économique et protection de l’environnement».

Les pouvoirs publics, sans réfuter l’éventualité de menaces, rassurent. Mohamed Brahimi, wali de la région de l’Oriental, comprend les craintes des écologistes. «Méditerrania Saïdia est un méga-projet national appelé à servir de moteur de croissance pour la région et doit générer richesse et emploi», explique le wali.

Pour lui, la zone présente de nombreux atouts qui ont séduit le promoteur-développeur. «Le site qui accueille ce projet pharaonique n’était à l’origine qu’une zone marécageuse, sablonneuse au piedmont des Béni Znassen et à proximité de la zone humide autour de l’embouchure de la Moulouya. Il s’agit, en l’occurrence, d’un vaste terrain d’épondage de crues sans valeur économique», précise-t-il.

L’optimisme est aussi au rendez-vous du côté de Bouchaib Hadir et Abdelaziz Hossaini, directeurs respectivement à l’Office national de l’eau potable (ONEP) et des eaux et forêts. Pour Hadir, il n’y a pas d’inquiétudes à avoir vis-à-vis des ressources hydriques. Le prélèvement des eaux d’irrigation se fera à proximité de l’oued Moulouya. Le débit de 120 litres/seconde est négligeable par rapport au débit de l’oued. Et d’ajouter, il n’aura aucune conséquence ni sur les eaux destinées à l’irrigation des terres ni sur l’eau potable.

Le directeur des eaux et forêts souligne que la forêt n’est pas «un endroit à garder éternellement intact. On peut la préserver, la protéger tout en l’aménageant».

Espaces verts
Aux inquiétudes des écologistes, le wali de l’Oriental, Mohamed Brahimi, répond que le projet de station balnéaire de Saïdia prévoit de nombreux espaces verts. Des terrains de golf, des espaces publics et des jardins récréatifs sont notamment au programme.

Par ailleurs, le dragage et les murs de sable opérés par l’aménageur ont, reconnaît le wali, pour effet de changer la physionomie du site naturel. «Mais cela, rassure-t-il, est sans effet sur l’équilibre écologique. Ajoutant que les autorités publiques veillent scrupuleusement à l’équilibre naturel de Saïdia à travers le respect du périmètre du Sibe (Site d’intérêt biologique et écologique) limitrophe à la station.

Mohammed Zerhoudi
Source: L'Economiste

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