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La jeunesse marocaine en manque de repères

Imiter aveuglémént l'Autre, c'est se renier soi-même. Dans son livre-lige, «Le vieux nègre et la médaille» (1956), l'écrivain camerounais Ferdinand Oyono avait très tôt mis en garde la jeunesse des pays colonisés contre le «déboussolement» qu'elle risque au contact des valeurs occidentales. Un demi siècle plus tard cette mise en garde reste d'actualité. En effet, sous nos cieux, quelques jeunes marocain(e)s sont entre le zist et le zeste.

A force de regarder des émissions étrangères osées, de voir et d'entendre des choses qui se passent ailleurs, ils sont manifestement très influencés. Du coup, ils cherchent à appliquer ce qu'ils ont vu et entendu. Mais sont-ils conscients du déboussolement qu'ils font courir à eux mêmes et à leur société ?

«Le corbeau aura beau se laver, il ne deviendra jamais blanc». Ce proverbe danois définit bien la situation de certains jeunes marocains qui veulent suivre fatalement les traces de leurs compères étrangers, mais qui sont handicapés et ligotés par les traditions déjà ancrées. L'impact de la télévision et du «bouche à oreille» sur cette frange importante de la société est, en effet, très retentissant. Exemple très significatif : Le vendredi soir dernier au Pub-restaurant, «La Bodega» pour ne pas le nommer, une jeune fille, âgée de la vingtaine maximum, s'est comportée d'une manière qui a choqué pratiquement toute l'assistance sauf ses amis bien sûr. En fait, elle s'est mise sur la table et a déversé la moitié d'une bouteille d'eau sur son pull déjà moulant et blanc. Non satisfaite du résultat, par trop scandaleux et malséant puisqu'il était accompagné de gestes obscènes, elle est carrément passée au strip-tease sans gêne aucune, en enlevant le haut pour dévoiler juste un semblant de soutien gorge. Cette jeune fille qui s'est déjà bien rincé le bec à coup de vodka n'a freiné ses ardeurs qu'à l'arrivée du serveur qui l'a hargneusement sommé de se calmer et de descendre de la table. Résultat des courses : l'assemblée était divisée entre, d'un côté, des jeunes qui trouvaient ce comportement normal et, d'autres, offusqués de la pire manière. In fine, la majorité qui l'a remporté s'est agie de la partie indignée par cette exhibition sans vergogne. D'aucuns en ont fait «Le» sujet de conversation de toute la soirée au sortir de cette «star» !

Certes, nous a confié un client trentenaire, «Jeunesse et sagesse ne vont pas souvent bon ménage», mais il y a un strict minimum. Et d'ajouter : «Une pareille conduite est très normal dans d'autres lieux et en d'autres circonstances. Ce soir, je suis en compagnie de ma fiancée et je ne peux accepter qu'elle se figure que je l'ai invité à dîner dans une boîte de strip ! Le traitement du serveur, jugé un peu «goujat» par certains, m'a paru personnellement très approprié. Je dirais même qu'elle méritait plus !»

Cette opinion est partagée par la majorité écrasante des clients. Des Français étaient également attablés pas loin et ont assisté à toute la scène. Tous se sont accordés à dire que cette situation est tout à fait normale dans leur pays, par contre au Maroc cela est encore très mal perçue. «Ce que j'ai vu n'avait rien de sexy, ni d'amusant, c'était à la limite répugnant et trop exagéré. Franchement, j'ai constaté que les jeunes d'aujourd'hui ne savent pas où donner de la tête. Ça a commencé avec les tatouages, le piercing, la musique hard, les tenues vestimentaires osées, mais là ça frôle l'inacceptable ! Je ne suis pas contre la liberté des jeunes mais il y a des limites quand même.», a martelé un Français qui vit depuis 3 ans à Casablanca.

Pavé dans la mare, certains jeunes patinent dans une réelle confusion. Ils veulent tellement s'apparenter aux occidentaux en se la jouant cool, qu'ils finissent par perdre tout point de repère. Avec un caractère très révolté, plusieurs jeunes marocains vivent encore dans le rêve et ne comptent pas s'en réveiller de sitôt. Entre réalité et espoir nourri, il en est des vérités qu'il ne faut surtout pas mettre au placard à défaut de déception et d'amertume.

Meyssoune Belmaâza
Source: Al Bayane

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