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Abdelaziz Bennani révèle les atermoiements de l'IER

Nouvelle attaque frontale contre le travail de l'Instance présidée par Driss Benzekri. Abdelaziz Bennani, ex-membre de l'IER, dénonce, dans un document, l'approche de l'Instance et revient sur les conclusions de l'affaire Ben Barka.

Abdelaziz Bennani a marqué les esprits. Il est le premier membre de l'Instance Equité et Réconciliation (IER) à critiquer ouvertement le travail de l'Instance présidée par Driss Benzekri. Dans la dernière édition de l'hebdomadaire arabophone "Assahifa Al Maghribia", l'ex-président de l'OMDH a publié un document explosif sur l'approche utilisée par les membres de l'IER. Abdelaziz Bennani revient sur trois points importants. Il s'agit de l'affaire Ben Barka, de la présentation du rapport final de l'Instance et du dossier des assassinats politiques. « Il faut rappeler que le retard pris dans l'élaboration du rapport final de l'IER n'a pas permis à tous les membres de l'Instance de valider la copie finale dudit rapport et de soumettre leurs remarques avant la fin de la période requise », révèle l'ex-président de l'OMDH. En d'autres termes, Bennani dévoile une vérité qui met en cause les dires de Driss Benzekri qui a toujours soutenu que tous les membres de l'IER avaient été consultés avant la publication du rapport final. Cette révélation démontre également que les conclusions de l'IER ne font pas l'unanimité au sein même de l'Instance. Et pour cause, plusieurs dossiers n'ont pas été convenablement traités.


La question des disparus en suspens

Au contraire, le président de l'IER a omis d'approfondir certaines enquêtes pour des considérations purement politiques. Abdelaziz Bennani va plus loin. Il affirme dans son document que « même si la création de l'IER est une étape cruciale dans l'établissement de la vérité concernant les années de plomb, la question des disparus reste d'actualité puisque la vérité sur la disparition d'un grand nombre d'opposants n'a toujours pas été dévoilée ». Et d'ajouter, « le Conseil consultatif des droits de l'homme (CCDH) n'est pas qualifié pour entreprendre ce travail puisque ses statuts juridiques ne lui permettent pas d'enquêter ». Bennani propose la refonte du dahir du CCDH et assure, en rappelant l'expérience de l'IER, que « sans la collaboration des services de sécurité, aucune instance ne peut établir la vérité et permettre de tourner la page des années de plomb ». En filigrane, le document de l'ex-président de l'OMDH met en avant la réticence des différents services à soumettre des documents à l'IER. Pire, les sécuritaires ont refusé toute collaboration avec l'IER. Cela dit, pour Abdelaziz Bennani, le point noir du rapport demeure l'affaire Ben Barka. Incontestablement, l'Instance a évité de mettre en avant l'implication des autorités marocaines dans l'assassinat du leader socialiste. Abdelaziz Bennani rappelle un fait important. « Le rapport final de l'Instance est mitigé concernant l'affaire Ben Barka. Même s'il apporte des éléments considérables sur la responsabilité des autorités marocaines, la mouture finale estime que l'Etat marocain n'est qu'une partie dans cette affaire, dans la mesure où un de ses services a été mis en cause ». Et pourtant, dans un premier temps, les membres de l'IER avaient reçu la famille Ben Barka et leur avocat. Driss Benzekri avait promis que l'Instance mettrait tout en œuvre pour connaître la vérité sur l'assassinat du fondateur de l'UNFP. Abdelaziz Bennani revient sur un événement important.


Responsabilités minorées

« Dans un premier rapport, l'IER avait manifesté son désir de récupérer les archives et d'auditionner tous les témoins marocains, notamment les fonctionnaires du CAB1 mis en cause dans cette affaire. L'IER voulait également revenir sur l'assassinat des "malfrats" français qui avaient rejoint le Maroc après le rapt de Ben Barka ». L'IER ne respectera aucune de ces recommandations. Bennani révèle que « la Direction Générale des Etudes et de la Documentation, qui a remplacé le CAB1, n'a remis aucun document à l'Instance. Cette dernière a auditionné deux ex-agents impliqués dans l'affaire Ben Barka et a visité le Point fixe 3 quelques jours avant la fin de sa mission ». Lors de la dernière réunion, les membres de l'Instance n'ont pas pu se mettre d'accord sur les conclusions concernant l'affaire Ben Barka. Pis, le chapitre relatif à ce sujet a été rédigé le 30 novembre dernier alors que la majorité des membres de l'Instance était absente. Le document de Bennani reflète une réalité évidente : des considérations politiques ont inhibé le travail de l'IER. Driss Benzekri a cédé aux pressions des sécuritaires. Dans le même cadre, Abdelaziz Bennani revient sur la disparition et l'assassinat d'ex-résistants entre 1963 et 1964 à Derb Moulay Chrif par les services de sécurité marocains. Parmi eux, Mohamed Najem Doukali, Mohamed Skali, Haj Lekbir et Brahim Manouzi. La sortie médiatique d'Abdelaziz Bennani pointe du doigt les conditions de travail de l'IER. Même si le rapport a dévoilé plusieurs vérités, il n'en demeure pas moins que, concernant plusieurs affaires, certaines zones d'ombre n'ont toujours pas été élucidées.

Mouaad Rhandi
Source : Le Journal Hebdomadaire

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