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Mode d'emploi de la commission d'enqête sur Sidi Ifni

A quoi sert une commission d'enquête ? Comment fonctionne-t-elle ? La commission chargée d'enquêter sur les événements de Sidi Ifni fera-t-elle mieux que les précédentes ?

Les travaux de constitution de la commission d'enquête chargée de faire le point sur les événements de Sidi Ifni avancent. Moins d'une semaine après l'annonce de sa création, le nombre des parlementaires devant la composer est désormais fixé. Ils seront 15 parlementaires à lancer l'enquête. Ainsi en a décidé Mustapha Mansouri à l'issue d'une réunion tenue lundi au Parlement avec les députés. La date du début des travaux reste cependant à déterminer. «Ce sera dans les plus brefs délais», nous apprend-on du côté de la première Chambre. La question qui se pose concerne surtout le fonctionnement de cette commission. Sur ce volet, deux textes de loi font office de référence. Le premier n'est autre que la Constitution, dont l'article 42 stipule que ces commissions sont créées soit à l'initiative du roi en personne, soit à la demande de la majorité des membres de l'une des deux Chambres. Bien que certaines sources avancent la thèse d'une volonté royale ayant conduit à sa constitution, la commission d'enquête reste, du moins officiellement, l'émanation des représentants du peuple. Le second est le règlement intérieur du Parlement, qui précise que les commissions d'enquête sont constituées sur la base de la représentativité des partis au Parlement. Cela revient à octroyer trois «sièges» à l'Istiqlal, deux au PJD et autant à l'USFP Signe du secret devant marquer ses travaux et conclusions, ces commissions excluent de facto tout parlementaire ayant fait l'objet de mesures disciplinaires pour avoir révélé le contenu d'une pareille initiative dans le passé. Le contenu des conclusions sera formulé suite au regroupement des éléments d'information sur les faits objet de l'enquête et sera formalisé dans un rapport que la commission d'enquête remettra au président du Parlement. Ayant un caractère temporaire, cette mission prendra fin dès dépôt dudit rapport. Le président du Parlement se charge par la suite de le transmettre au Premier ministre, qui décide de saisir le ministre de la Justice en vue d'éventuelles poursuites judiciaires, ou de classer le dossier. D'ailleurs, «Il ne peut être créé de commission d'enquête lorsque les faits ont donné lieu à des poursuites judiciaires et aussi longtemps que ces poursuites sont en cours. Si une commission a déjà été créée, sa mission prend fin dès l'ouverture d'une information judiciaire relative aux faits qui ont motivé sa création», peut-on lire dans le texte de la Constitution. Reste qu'ils sont nombreux à douter de l'efficacité d'une telle action.

Les antécédents des commissions d'enquête sur le CIH et la CNSS, ne laissent guère de place à l'optimisme. Après une série d'auditions, les députés pour la première et les Conseillers pour la seconde ont rendu des rapports, sans qu'aucune action judiciaire ne soit déclenchée contre les auteurs des fraudes. Reste que l'actuelle commission d'enquête a été enclenchée pour enquêter sur des faits avérés, avec des degrés de responsabilités mais aussi des victimes, plus ou moins délimitées. Dans les précédentes commissions, il s'agissait souvent d'un phénomène de dilapidation systématique des deniers publics qui s'est étalé sur plusieurs années et donc d'affaires trop vagues pour donner lieu à des actions concrètes.

Le PJD anticipe

Alors que la commission n'a pas encore tranché quant à la date de démarrage de ses travaux, le groupe PJD s'est d'ores et déjà démarqué en organisant un déplacement à Sidi Ifni. Menée par Mustapha Ramid, président du groupe, cette visite n'entre pas, d'après lui, en contradiction avec la commission à venir. «Elle vise ni plus ni moins à communiquer avec la population et à la rassurer», a dit Ramid dans un entretien accordé au quotidien Attajdid. Ce déplacement intervient dans un climat toujours, chargé de tensions et où les grèves et autres manifestations sont toujours de mise, à Sidi Ifni comme ailleurs. Recueillis sur place par le groupe PJD, les témoignages des habitants, sans parler ni de meurtres ni de viols, ont néanmoins souligné les abus divers dont l'intervention des forces de l'ordre a été marquée : des blessures encore visibles sur les corps, aux portes et demeures saccagées, en passant par des cas de vols d'argent et de téléphones portables. Les visites effectuées par le groupe PJD dans plusieurs endroits de la ville confirment plus d'une thèse de dépassements en tous genres.

Ramid n'hésite d'ailleurs pas à citer un vieil homme qui a affirmé que ce qu'il a vu s'abattre sur la ville est pire que ce qui s'était passé du temps du temps de la colonisation. «La ville a été victime d'une opération d'abus généralisée, une punition collective. Les forces de l'ordre se sont tout permis. Tout en restant attachés à leur pays, les habitant tiennent également à ce que les responsables de ces agressions soient punis», a-t-il conclu.

Tarik Qattab
Source: Le Soir Echos

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