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Paradise Mombassa - Peur et mépris dans les jardins kényans
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26 janvier 2006 18:46
21 Janvier 2006 Par Omri Hasenheim

Le document qui suit est un article du journal Maariv, il a été traduit de l’hébreu en anglais et présenté par Gilad Atzmon. Il est traduit de l’anglais en français par Yves Lecrique, membre de Talxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique ([email protected]). Cette traduction est en copyleft.

Gilad Atzmon est un ancien Israélien, musicien de jazz, écrivain politique et romancier. Il est citoyen britannqiue et réside à Londres. Ceci est sa première traduction, d’un article auparavant disponible uniquement en hébreu. Voici la présentation qu’il a fait du reportage de Maariv. La version originale anglaise est parue ici.

Paradise Mombassa - Peur et mépris dans les jardins kényans

Le 22 novembre 2002, l’hôtel ‘Paradise Mombassa’, un hôtel israélien sis au Kenya, fut attaqué par un groupe terroriste. L’article du Maariv qui suit ne s’intéresse pas à Al Qaïda, mais se soucie plutôt de la dévastation laissée par les Israéliens derrière eux.Ce qui suit est l’histoire d’un bel hôtel israélien installé sur la côte africaine. C’est l’histoire d’une station de vacances sous propriété israélienne à Mombassa, Kénya, planifiée et construite uniquement pour le marché du tourisme israélien. C’est aussi l’histoire de l’outrage total d’une population locale paupérisée. C’est le récit de l’humiliation, de la cruauté, et du viol continu et quotidien de femmes africaines en lutte. C’est l’habituelle histoire horripilante d’Israéliens infligeant des peines aux autres, mais très drôle dans le même temps, un dépit d’elle-même. Par exemple, une fois par semaine, quand les groupes d’Israéliens montaient dans les cars du départ pour retourner à l’aérogare de Mombassa, la direction locale ordonnait au personnel africain de poursuivre les bus en larmes, à grandes effusions, et de répéter « Ne nous quittez pas ! nous vous aimons ! s’il vous plait, revenez ! » Cette instruction étonnante était donnée au personnel local par la direction israélienne de l’hôtel, comme partie intégrante de la formule touristique, dernière impression, pour la ramener après des vacances inoubliables.

Je me permets de conjecturer que les gestionnaires israéliens avaient détecté quelque manque d’amour parmi leur clientèle israélienne. On peut légitimement s’interroger sur ce qu’il y a derrière ces soudaines envies de déclarations d’amour. Considérant le fait indéniable que ces touristes israéliens occupaient leur séjour à transformer Mombassa en enfer sur terre, pourquoi un tel besoin certifié d’être aimés après cela ? Je me demande pourquoi le persécuteur israélien insiste à être aimé de sa victime ? Après tout, les êtres humains ordinaires n’attendent pas des éruptions d’amour de la part de leur réceptionnistes ou de leurs femmes de chambre. Mais, après tout, les êtres humains ordinaires n’ont pas tendance à humilier, insulter et violer le personnel de l’hôtel.

Ils peuvent passer quelque temps à l’hôtel, peuvent apprécier ses services, puis ils paient et quittent les lieux poliment et sans fanfare. Pour les touristes israéliens, comme vous allez le lire, le séjour à l’hôtel s’entend comme un évident ‘laisser aller.’ C’est l’environnement idéal pour manifester ses propres pulsions libidinales les plus sombres, et pratiquer l’abaissement moral le plus complet. Pour le touriste israélien, les vacances sont la matérialisation et l’incarnation de son zèle du contrôle. Pour les Israéliens, aller en vacances en Afrique, c’est expérimenter les manières variées de virer à l’animal sauvage.

La pièce journalistique suivante est un observatoire, une ouverture dans la condition pathologique psychiatrique israélienne. C’est l’histoire étrange d’une identité criminelle absurde qui réclame de l’affection de la part de ses victimes. Elle n’a pas été écrite par moi-même, je l’ai juste traduite en anglais. Elle a été publiée à l’origine en hébreu dans le Maariv, le deuxième quotidien israélien en importance. J’ai dédié beaucoup de mon temps à la traduire parce que je pense qu’il devient crucial pour les gens hors d’Israël de pouvoir comprendre le caractère israélien et ses caractéristiques.

Apparemment, certains parmi nous ont tendance à croire que l’approche israélienne envers les Palestiniens est une affaire de circonstances coloniales particulières. Apparemment, ils ont tort. L’’israélitude’, ou l’’israélité’, est une forme radicale de cruauté aveugle et les Israéliens n’ont aucun problème à l’emporter avec eux, là où ils vont. En Palestine ce seraient les Palestiniens qui en souffrent, à Goa ce sont les Indiens pauvres. Dans l’article qui suit ce sont les classes laborieuses et démunies de Mombassa, Kénya, qui sont confrontées au sadisme israélien. Il y a un vieux et fameux slogan : “Vous pouvez faire sortir un homme d’Israël mais vous ne pouvez pas faire sortir Israël d’un homme.” Il est peut-être temps de prendre une grande et belle respiration avant de lire ce dont les hommes d’Israël sont porteurs.

Peur et mépris au Paradis

par Omri Hasenheim, Kénya, Maariv,14 Octobre 2005. Original ici.

A l’hôtel Paradise Mombassa, les membres du personnel étaient humiliés par les touristes israéliens ; ce n’est pas une surprise si, même après les attaques terroristes sur l’hôtel, ils refusent de pardonner, non pas Al Qaïda, mais nous (les Israéliens.)

Un hôtel posé sur un sable blanc, apparemment plus beau que jamais. Les bâtiments luxueux vous invitent à une ‘pause de rêve’, les chambres et les suites sont chargées de mobiliers exceptionnels et faits-main. Entre les bâtiments restaurés vous trouverez un ruisseau avec des poissons dorés. Au bar vous pouvez entendre les échos de quelques rythmes africains lascifs et relaxants. Tout autour de la piscine géante vous pouvez voir de nombreux singes qui bondissent. De la salle à manger, vous avez une vue splendide sur la mer. Chemin faisant vers cette salle à manger, vous pourriez souhaiter voir le bassin de l’alligator ; visiblement, depuis cette horrible journée de terreur l’alligator a grossi un peu.

Bienvenue au paradis, l’hôtel Paradise Mombassa

A juste un kilomètre de là, dans un village appelé Msomrini, deux petites orphelines se font des dreadlocks. A proximité derrière elles, il y a un abris de terre misérable, aux alentours des gamins pauvrement habillés qui jouent. Ils sont sales, leurs nez coulent. Quelques tabourets cassés gisent ça et là... Sur l’un d’eux est assise Dama Safaria. Avant qu’Al Qaïda fasse exploser le peu qu’elle avait, elle travaillait à l’hôtel comme danseuse. Pendant deux années, elle pratiquait des danses populaires traditionnelles africaines, chose qui lui permettait d’oublier un peu la misère dont elle était issue. A Msomrini, tout le monde était heureux de pouvoir danser pour juste 2 dollars par jour. Au début Dama était plutôt contente, mais alors, au fil du temps, les employeurs israéliens réalisèrent qu’ils pouvaient probablement s’en tirer sans payer. Après les spectacles, son mari avait pris pour habitude d’aller parcourir la distance du village à l’hôtel pour quémander sa paie. « On aimait bien danser pour les Israéliens, » dit Dama, « mais quand le jour de la paie arrivait, nos sourires s’effaçaient. »

Le matin du 22 novembre 2002, les terroristes d’Al Qaïda attaquèrent l’hôtel. Après l’explosion, il ne fallut pas beaucoup de temps à Dama pour se rendre compte que son mari était manquant, et elle était horrifiée, et quelques minutes ensuite on lui dit qu’il avait été tué. Depuis lors, elle et ses neufs orphelins luttent pour se maintenir. Son plus jeune fils a tout juste quatre ans. De la direction de l’hôtel par contre, elle n’a rien entendu ; personne ne lui a rendu visite ou simplement offert ses condoléances. Ni le gouvernement israélien ni les officiels kényans ne lui ont montré le moindre égard, le moindre intérêt. « On nous doit à nous, la compagnie de danse, encore 120 dollars pour nos quatre derniers spectacles devant ces touristes israéliens, », déclare-t-elle en désespoir de cause.

« Après l’attaque terroriste ma vie est devenue impossible. L’hiver je supplie les fermiers de cultiver notre terre pour quelques malheureux centimes, » l’été elle ne comprend pas elle-même comment elle s‘en sort.

Il y a deux mois, le Paradise Mombassa fut réouvert sous une nouvelle direction comprenant un Israélien, un Français et un Américain. Ils essaient de minimiser leur visibilité, tout comme le précédent propriétaire, Yeuda Sulami, qui nie jusqu’à ce jour sa participation dans la précédente direction. La nouvelle direction fait de son mieux pour changer l’image de l’hôtel, ils essaient de laisser de côté le marché israélien. Ils se tournent plutôt vers les marchés européens et américains.

Mais pour de nombreux résidents locaux, ce lifting de façade des affaires ne fera pas grande différence ; le souvenir de toutes ces années de mauvais traitements de la part des touristes et de la direction israéliens ne risque pas de s’effacer. Ils n’oublieront pas les clients israéliens qui les ont assaillis sexuellement ou étaient simplement grossiers et arrogants. Il n’oublieront pas la direction israélienne et ses exigences professionnelles étranges, qui oubliait de payer les salaires mensuels à temps, puis arrêta de payer tout court. A présent, tout espoir perdu, ou peut-être par désir d’ouvrir leurs cœurs, ils donnent leurs versions personnelles du ‘Paradise Mombassa’.

L’idée de bâtir un hôtel israélien sur le front de mer kényan à la fin des années 90 s’est révélée bien ingénieuse. Jusqu’alors, le Kénya tenait sa réputation de ses safaris sauvages pleins d’aventures. Yeuda Sulami et son partenaire en entreprise Itzik Mamman ont produit l’idée d’utiliser le Kénya comme station de vacances israélienne. Ils ont monté une compagnie et ont commencé à vendre des formules complètes avec les vols, la résidence et les aventures locales pour touristes. Au début, ils négociaient les services de logement avec des entreprises locales. Mais l’appétit israélien ne connaît pas de limites. « Pourquoi ne pas rafler le vrai argent nous-même ? » se demandaient les deux, « On devrait construire notre propre hôtel sur la plage. » Rapidement, ils trouvèrent à associer des investisseurs locaux et fondèrent une entreprise de ‘locations partagées’ de lieux de vacances pour Israéliens. La clientèle israélienne réagit avec enthousiasme, et à la fin de l’histoire il y avait un attrayant hôtel offrant ses plages ensoleillées pendant l’hiver israélien, complet avec une industrie du sexe à bon marché florissante à juste quatre heures et demie de vol de Tel Aviv.

Le leitmotiv qui guidait Sulami et Mamman était que le client israélien qui pouvait se rendre au Kénya pouvait donc y retourner. Les formules-promotion étaient vendues à des prix ridicules. L’affaire s’enclencha parfaitement bien. De nombreux Israéliens sont revenus et investirent dans les logements de vacances (un Israélien acheta 52 unités d’habitation pour la somme de 1,5 millions de dollars.) Chaque semaine 250 Israéliens atterrissaient à l’aéroport de Mombassa, ils trouvaient là un hôtel israélien, entièrement casher, avec même sa propre synagogue. Le complexe entra en fonction pendant l’année 2000 et fut officiellement lancé un an plus tard. Le personnel local était recruté des hôtels alentours. La plupart des employés admettent qu’au début ils étaient plutôt heureux, mais les choses se sont détériorées rapidement peu après l’ouverture officielle. Plutôt rapidement, il devint clair que quelqu’un devait payer pour les extravagances israéliennes.

L’homme ne devrait jamais être seul

Trois ans plus tard, l’humiliante pratique reste comme une blessure ouverte dans la mémoire du personnel féminin de l’hôtel. Une fois par semaine, quand les Israéliens faisaient leurs préparatifs de départ pour rejoindre l’aéroport, une alarme sonnait. « Préparez-vous, les clients s’en vont, » clamait le chef d’équipe des animations, fébrilement à la poursuite du personnel féminin. Elles avaient ordre de s’attrouper vers l’entrée du domaine et de poursuivre les cars en partance en pleurant désespérément sous les yeux des Israéliens. Une fois qu’elles avaient rejoint les bus il leur fallait frapper sur les tôles avec des larmes dans les yeux.

« C’était un ordre bizarre, » sourie Saline Aching, la masseuse en chef. « On nous demandait de poursuivre les bus, de chanter et de pleurer pour que les clients sachent que nous les aimions et que nous voulions qu’ils reviennent. Je me revois courant dans un état frénétique, et je frappais le car avec mes poings en criant aux ‘invités’, « Pourquoi vous nous abandonnez ? », « Vous nous manquez ! », « Nous vous aimons ! » Les Israéliens nous contemplaient derrière les vitres, certains croyaient en notre sincérité, d’autres nous filmaient. »

Rahima Josef Katan : « Si vous ne pleuriez, pas vous pouviez vous trouver en danger de perdre votre emploi. On nous demandait de penser à quelque chose de vraiment triste qui nous était arrivé, pour qu’on pleure pour de vrai. Je ne pleurais pas. » « Je ne pleurais pas, » confesse Catherine Khaa, masseuse. « Comment aurais-je pu, je ne les aimais pas du tout. En fait, je les haïssais. »

La course hebdomadaire derrière les bus était juste un exemple de ce qu’il était exigé du personnel pour bien traiter les clients israéliens. Les principes étaient évidents : humiliation, oubli de la dignité, travail dur. Les lignes de conduites étaient claires : le client a toujours raison, le client doit être heureux, le client doit revenir. Celle qui portaient le plus lourd fardeau étaient les femmes de l’équipe des animations. Dorothy Maly se souvient qu’une fois par semaine, le jour de l’arrivée, cinq d’entre elles étaient emmenées à l’aéroport de Mombassa. « On leur chantait Jambo Jambo (bonjour bonjour), et Evenu Shalom Aleichem. Les Kényans d’ici étaient sûr qu’on était devenues maboul mais les Israéliens étaient sur la lune. Ils aimaient le bruit, et une fois arrivés à l’hôtel, on se remettait à chanter bien fort. La nuit nous avions l’instruction de crier jusqu’à ce que le dernier Israélien ait quitté la piste de danse. Si un client décidait de ne pas dormir, nous avions ordre de rester auprès de lui jusqu’à ce qu’il quitte la salle pour sa chambre. On nous demandait de produire du bruit, pratiquement 24 heures par jour. Quand on prenait une pause, le manager arrivait et se mettait à gueuler : ‘ Qu’est-ce qu’il vous arrive, vous dormez ? Je vais couper votre salaire, dépêchez vous...’ »

Le plan professionnel était qu’un client qui s’ennuie ne reviendrait jamais. Rahima Raymond, masseuse : « Nous étions condamnées à rester assises avec les clients jusqu’aux petites heures de la matinée, de traîner avec eux. Sulami s’était bien fait comprendre qu’on devait garder les clients heureux. On dansait avec les hommes dans les night-clubs simplement pour s’assurer qu’ils ne restaient jamais seuls. Au cas où nous refusions d’agir de la sorte, ils se plaignaient auprès de la direction : ‘Pourquoi elles ne sortent pas avec nous ?’ ‘On veut voir la nuit africaine’. Evidemment ils ne se souciaient pas de nos engagements et de notre vie familiale. Evidemment, on ne percevait aucun ‘extra’ pour ses services. Le jour suivant, alors qu’ils étaient encore au lit nous devions nous lever et recommencer à huit heures du matin. La maxime ‘Le client a toujours raison’ pris le pas sur tout. Josef Katan : « Ils nous apprirent un code de comportement ; si un homme était près de sa femme, on était supposés tenir sa main d’une façon particulière, si sa femme était ailleurs, alors nous devions nous comporter de façon toute différente. »

« Il y avait les Juifs religieux qui ne pouvaient pas signer leurs notes de chambre le jour du Shabbat. On gardait alors une note avec leur numéro de chambre attachée à leur facture. Une fois le Shabbat écoulé, certains refusaient simplement de payer. Ils débattaient et argumentaient que nous avions tout inventé, ‘vous avez falsifié nos signatures’ disaient-ils. La direction les croyait toujours, et nous obligeait à régler ces notes. Je ne croyais tout simplement pas que des être humains pouvaient se comporter de cette façon. »

Etre vu comme un Africain

La demande sans cesse croissante de distractions des clients Israéliens amena à une maximisation de l’utilisation de la force de travail locale. Le personnel était mobilisé des différents départements vers l’équipe des animations. « Ils pouvaient me tirer de la cuisine, me disant que les clients voulaient avoir du bon temps et que je devais y aller et rester auprès d’eux, » dit Josef Katan. « Alors je demandais, comment pourrais-je cuire des cookies et danser simultanément ? L’hôtel entier était une escadre du divertissement. Le personnel de cuisine étaient des amuseurs, les réceptionnistes étaient des amuseurs, les jardiniers étaient des amuseurs. » Mali, une danseuse : « Saline, la masseuse en chef, nous criait quelque chose quand trop d’Israéliens voulaient un massage au même moment. A l’époque, je n’y connaissais rien en massage. Il y avait une femme que le rabbin de l’hôtel avait amené, et qui était supposée nous apprendre. Après une courte instruction de cinq minutes, j’étais apparemment prête pour l’essai. »

Afin de maintenir un ‘authentique esprit africain’, le personnel était obligé de porter des tenues très courtes. A l’inverse des autres hôtels de la régions, où des hommes servent en uniforme, au Paradise Mombassa le personnel masculin se promenait à demi-nu et pieds nus. Les femmes avaient pour toute autorisation une étoffe minimale sur leurs poitrines et sur leurs pubis. « Même quand la température tombait nous n’avions pas le droit de nous couvrir. » Marci Mawagambo Aching nous dit : « Sulami voulait que nous ayons l’air ‘authentiques’ pour que quand vous marchiez autours d’eux, les client puissent vous remarquer pour la soirée. Vous deviez avoir l’air attrayante, pour qu’ils réservent de nouvelles vacances. C’était horrible, mais que pouvions-nous faire ? J’avais besoin de l’argent. Une des directrices féminines israéliennes nous dit que nous ferions mieux de suivre les ordres de Sulami ; s’il veut que nous ayons l’air d’Africaines, il valait mieux paraître comme telles. »

Même les commodités les plus élémentaires manquaient. ‘Paradise Mombassa’ est situé à 8 kilomètres de la route principale. Le chemin de terre vers l’hôtel traverse une savane sauvage infestée de hors-la-loi. Cependant une solution a été trouvée, un camion de transport d’animaux fut converti pour transporter quarante humains. Un employé israélien dit : « C’était un camion fermé et il n’y avait pas de bancs. Les gens étaient tellement serrés là dedans qu’il fallait laisser la porte arrière ouverte.” Josef Katan : On avait l’impression d’être des animaux. Parfois on manquait d’oxygène, mais on savait que si on se plaignait, alors il nous faudrait rester à demeure à l’hôtel. Ce qui voudrait dire évidemment qu’on ne pourrait plus voir nos familles. Alors on se taisait. » Une fois un directeur nouvellement embauché demanda ce que les Kényans pensaient de la façon dont ils étaient transportés. La réponse fut assez claire, « pour eux peu importe, tant qu’ils arrivent à leur lieu de travail ils sont contents. » Même pour les repas au travail, ils devaient se débrouiller. Mais là aussi une solution créative fut trouvée. Achting : « Des fois Sulami était sympa et on pouvait manger les restes des clients. On avait de la chance parce que les Israéliens sont avides et gourmands ; ils allaient au buffet et prenaient dans leurs assiettes bien plus que leurs corps ne pouvaient accepter. Ils prenaient des piles de salades, d’énormes pièces de viande, et ensuite, ils les touchaient à peine et en laissaient la plus grande part derrière eux. » Mali : « Pour vous dire la vérité, on se rendait compte que la nourriture était déjà passée par l’assiette de quelqu’un d’autre, mais certains parmi nous devaient la manger, parce que simplement ils n’avaient pas les moyens d’en acheter ailleurs. Ils avaient faim, que faire d’autre ? »

Mais cela va plus loin. Il ne fallut pas longtemps avant que les employés indigènes se rendent compte qu’ils n’étaient pas assurés. Cela se révéla de façon éclatante quand un vigile fut assassiné et son collègue blessé durant un cambriolage ; à ce jour, ni la famille éplorée ni l’homme blessé n’ont reçu la moindre compensation. Des contrats de travail n’étaient accordés qu’aux plus hauts responsables. Les subalternes ne recevaient qu’un papier sans valeur avec le chiffre convenu dessus. Ce document n’a jamais été respecté par ceux qui ll’avaient émis.

Bonne machine, bonne machine

Saline Achling était curieuse d’apprendre certains termes hébreux, et c’est cet intérêt pour la langue hébraïque qui lui permit de comprendre le sens de ‘Akol Kalul’, ‘tout compris’. Personne parmi le personnel de l’hôtel ne pouvait d’ailleurs ignorer la signification de l’idiome hébreu qui devint la philosophie de travail de l’établissement. Tous les services d’hôtellerie étaient inclus dans la formule-vacance achetée là bas en Israël. Rapidement les employés apprirent ce que cet idiome précis voulait dire pour des Israéliens.

« Toute la journée j’entendais les clients s’écrier Akol Kalul, » dit Josef Katan. « Certains me tenaient par le bras et me criaient Akol Kalul. Même à la plage ils criaient aux passant Akol Kalul, Akol Kalul. Je leur demandais alors ce que Akol Kalul voulait dire. Ils répondaient « tout, même toi. » Ils fallait que je leur disent que je n’était pas la propriété de Sulami. Il possède l’hôtel mais pas moi. Et je pensais en moi même, “Mon, Dieu, se comportent-ils de cette façon dans leur propre pays ? »

Dans le meilleur des scénarios, l’Akol Kalul était pratiqué au buffet gratuit sous la forme de gigantesques pièces de viande posées dans une seule assiette. Dans les pires, il trouvait le chemin du salon de massage. Inutile de le préciser, pas un seul des clients n’oublia son droit à être massé. Achting dit : « La première chose que les hommes faisaient dès leur arrivée, avant même d’avoir déballé leurs bagages dans leurs chambres, c’était de foncer à la salle de massage. Ils entraient dans l’hôtel les yeux grands ouverts en demandant, ‘où est le salon de massage ?’ J’avais pris l’habitude de planifier son accès à la journée, il y avait une telle compétition entre eux pour être là-bas les premiers. »

Mali : « Mon rôle était de leur dire : ‘Je suis Dorothy et je suis masseuse à l’hôtel’. Dès que j’avais prononcé ces mots ils se mettaient à crier ‘massage ! massage !’ La plupart d’entre eux ne parlait pas l’anglais. Ils disaient juste ‘I come now’. [‘J’arrive’, NDT] Un touriste d’un autre pays aurait attendu deux semaines mais au Paradise, ils le réclamaient immédiatement, sur place. Parfois avant même le petit déjeuner. Vous aviez quelqu’un qui se présentait à vous et vous disait ‘Je viens pour un massage akol kalul, si vous ne faite pas akol kalul, je prends une autre masseuse’. »

« Ils disaient : ‘Je veux Harpaya, (éjaculation’), je demandais alors ce que ce Harpaya voulait dire et ils répondaient, ‘pas seulement Harpaya, mais on veut ‘tout inclus’, ‘full sex’, un rapport sexuel complet.’ Je leur disais qu’on avait pas l’habitude de faire ça et alors ils répondaient, ‘Lis bien sur mes lèvres, ‘Les femmes sont tout-inclus’, le vendeur à Tel Aviv nous a promis que c’est Akol Kalul !’ Parfois, une des managers féminins nous suggérait d’acquiescer aux caprices des clients, pour une garantie justement qu’ils reviennent. »

Katherine Kaha, masseuse, confesse qu’il lui fallait suivre ces demandes... « Je commençais un massage, et alors l’homme me disait, ‘fait le partout, tu dois le faire’. Au cas où je ne le faisais pas ils se seraient plaints à la direction. Je n’aimais pas ça du tout mais je l’ai fait. Ils me donnaient un dollar, des fois deux, je me sentais horrible.”

Un client israélien régulier : « Il y avait toujours ce problème avec le massage, les Israéliens prenaient l’habitude d’abuser des filles à l’extrême limite. C’était affligeant et donnait à Israël une mauvaise réputation. Il y avait certains groupes qui me faisaient honte, et que j’évitais. Ils étaient si directifs, si arrogants, ils faisaient tout ce dont ils avaient envie, ce qui leur passait par le tête, pour prendre du bon temps, tout simplement. » « Un des Israéliens me dit, », confie Rahima, « Tu sais Rahima, la nuit dernière ils m’ont fourni une petite chérie, de treize ans seulement, je l’ai baisée et lui ai donné juste 5 dollars parce qu’elle était sans argent. » Alors je lui est demandé, ‘Quel est l’âge de ta petite fille ?’ Il n’a pas répondu. Il aurait très bien pu revenir à l’hôtel, le même soir, en criant, ‘Les femmes africaines ont le meilleur rapport qualité/prix !’. Laissez-moi vous dire ; ici, en Afrique, il n’est pas si courant, après avoir couché avec une femme, de s’en targuer et d’en informer le monde entier. Mais les Israéliens étaient très ouverts pour cela, et avaient l’habitude de dire à propos de nous : Mechona Tova, Mechona Tova (bonne machine, bonne machine.) »

Le pouvoir de la baise

La passion pour le sexe n’était pas confinée aux salons de massage et n’était pas réservée aux hommes célibataires. Il était plutôt interdit de laisser pénétrer des filles du coin dans l’hôtel. Mais une solution fut trouvée, juste de l’autre côté de la rue, en partenariat israélien là aussi, un motel dit Calypso fut monté. C’était là où les Israéliens traînaient la nuit. « Les hommes débarquaient dans nos chambres et nous demandaient de sortir avec eux,” dit Josef Kaplan, “mais le pire était le lendemain matin quand ils faisaient partager à la salle de restaurant entière les détails de leurs affaires de la nuit. Ils péroraient, avec des choses comme ‘ha, j’ai été avec elle, et je l’ai baisée et baisée et baisée toute la nuit et pour moins d’un dollar’. On comprenait parfaitement ce qu’ils étaient en train de dire. Quand le premier groupe est arrivé, je me suis dit que sûrement le deuxième groupe serait meilleur. Mais non c’était exactement pareil. De temps en temps il demandaient un service de chambre, et quand la femme de chambre se présentait, ils essayaient de la toucher. Les serveuses étaient horrifiées, elles ne voulaient jamais aller porter la nourriture dans les chambres, mais avec moi c’était différent parce que j’étais de fer avec eux. Alors ils m’appelaient ‘gros cul’. Ok pour moi, cela vaut mieux d’être une ‘gros cul’ que d’être une esclave sexuelle. »

Même les hommes mariés arrivaient à trouver le chemin des chambres des filles. Par exemple l’un dit à sa femme, ‘Va à la salle de restaurant, je te rejoins là-bas.’ Et apparemment il disparu jusqu’au matin suivant. Et le matin nous avons vu la femme crier après son mari pendant le petit déjeuner. Une fois un homme répondit à sa femme, ‘les femmes au Kénya sont merveilleuses, elles ont un petit trou, alors que toi tu as ce gros trou idiot’. Tout cela au petit déjeuner, dans la salle de restaurant, en public. Quand l’animosité devenait sauvage, on se dépêchait d’aller trouver le rabbin pour l’emmener faire de son mieux pour restaurer la paix. Parfois, les hommes étaient assis dans la salle à manger pendant que des ânes se montaient à l’extérieur. Dès que les Israéliens les remarquaient ils se levaient et les encourageaient bruyamment : ‘bien, bon, bon, en avant, en arrière, bien, bon’. »

« A l’occasion, l’un deux se présentait à moi en disant devant tous les autres : ‘Je vais prendre du viagra et après j’aurai la patate pour baiser. Au fait, quel est ton nom ?’ Et je répondais ‘Rahima’. ‘Bien, Rahima. Je veux te baiser aujourd’hui !’ Je me demandais ce qu’il se passait. Un client me demanda, ‘Tu connais Charlie ? J’ai été avec elle à la disco, je l’ai baisée mais elle n’était pas bonne, du tout. Au début j’avais l’intention de lui donner 10 dollars mais finalement je ne lui en ai donné qu’un.’ Il éructait comme un fou et alors Charlie est entrée dans la pièce. Il a pointé son doigt vers elle et cria ‘là voilà, c’était elle.’ »

Karen Tiglo, une femme de chambre : « On n’arrivait pas à se décider si les Israéliens étaient des bêtes ou des êtres humains. Ils m’offraient 10 dollars à la moindre occasion. Je me sentais humiliée. Au bout d’un certain temps ils avaient repéré lesquelles parmi nous, le personnel féminin, étaient accrochées à l’argent et simplement allaient au devant de celles-ci. » Stela Matawa, une serveuse : « De temps en temps un homme m’approchait et faisait ses avances abusives, et au cas où je refuse, cet homme allait à la salle de restaurantetcriait, ‘Laissez la tomber celle-là, c’est de la daube, je l’ai emmenée dans la chambre et elle était incapable’. »

Katherine Kaa eut à endurer une expérience particulièrement traumatisante quand un homme de soixante-dix ans décida qu’il était tombé amoureux d’elle. « Je ne l’aimais pas du tout, » dit elle. « Nous sommes sortis en boîte, j’étais sûre que je ne l’escortais que pour l’aider à tuer son ennui. Sur le retour, lui et le chauffeur de taxi m’ont piégée ; au lieu de nous ramener à l’hôtel, nous sommes arrivée à un endroit qui loue des chambres pour la nuit. Violemment, il essaya de me forcer à coucher avec lui. Mais je ne pouvais pas. Quand nous sommes retournés à l’hôtel il me dit qu’il ne voulait plus jamais me revoir. Et qu’il rapporterait à la direction que je lui avais fait perdre son argent sans rien en retour. Après après eu connaissance de mon refus, le patron de l’hôtel m’a mise à pied pour deux semaines. »

Si l’on se fie à certains membres du personnel, non seulement la direction israélienne fauta en ne dénonçant pas, mais en fait certains des dirigeants se joignirent à l’équipée (leurs noms sont connus de la rédaction du journal). D’après Raymond, « A l’époque l’un des directeurs apprit à apprécier les massages. Il se mit à demander, ‘fais-le là, là, et aussi là’, comme un client. Un autre des responsables attrapait des filles de l’équipe des animations, et disait : ‘Après tout, je suis un manager, personne ne te demanderas où tu es allée.’ Il fallait que j’accepte bien que ce soit plutôt horrible. Le jour suivant il passait devant moi, et me reconnaissait à peine. Chaque fois, après nos spectacles, une danseuse disparaissait dans un des bureaux de la direction. Les filles avaient peur qu’il y ait eu un problème professionnel avec leurs performances mais, une fois à l’intérieur du bureau du manager, elle comprenaient ce qui n’allait pas. »

Source : geostrategie.com

Frisetta

Source - [lesogres.org] -
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