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6 juillet 2006 21:20
Entretien avec A.D., membre du FPLP

Massif, comme pourrait l’être un paysan auvergnat, A.D. nous reçoit chez lui, cordialement, mais sans les débordements d’hospitalité habituels ici.

A.D. : J’ai 58 ans, je fais partie du FPLP depuis 1967 et depuis cette date je lutte contre l’occupation. J’ai fait mes études en Jordanie et au Caire, et j’enseigne actuellement l’économie à l’Université polytechnique de Hébron. On ne m’a pas laissé sortir de Palesitne depuis vingt ans. J’ai passé dix-sept ans dans les prisons israéliennes, la première fois comme leader étudiant en 1972 et la seconde en 1975, pour avoir tenté de créer une organisation commune avec le mouvement des Panthères noires d’Israël .

Q : Vous êtes donc un pionnier de la lutte conjointe des Palestiniens et des Israéliens contre l’occupation ?

R : Oui, j’ai travaillé à l’époque avec l’un de leurs leaders. Il a pu fuir en France, je ne l’ai jamais revu, je ne sais pas ce qu’il est devenu. Peut-être que le Mossad l’a assassiné...

Q : Est-ce que c’étaient des religieux ?

R : Quelques-uns, oui. Pas tous. Ce qui les réunissait, c’était la lutte contre toutes les formes de discrimination.

Q : Quelle est votre position dans le conflit actuel entre le Fatah et le Hamas ?

R : Le FPLP fait partie de l’OLP, qui regroupe tous les Palestiniens, aussi bien ceux d’ici que ceux de la diaspora. Nous sommes contre l’annexion de l’OLP par le Fatah. Sans même parler de la corruption. Nous sommes pour un Etat unique, laïque et démocratique, sur toute la Palestine historique. Pour atteindre ce but, nous sommes pour l’instant plutôt du côté du Hamas que du Fatah. Nous sommes avec eux pour dire que la lutte ne doit pas s’arrêter. Nous sommes contre la reconnaissance de l’Etat d’Israël. Il faut savoir faire des alliances, même avec des gens qui ne pensent pas comme nous sur tout. Les communistes ont bien combattu avec des catholiques pendant la guerre civile italienne. Les Israéliens n’ont pas à avoir peur. C’est une tradition chez les Arabes que de vivre en bonne entente avec les juifs.

Q : Cherchez-vous à établir des liens avec les Israéliens qui luttent contre l’occupation ?

R : Nous avons beaucoup de respect pour la véritable gauche israélienne. Mais nous ne pouvons pas attendre grand-chose pour l’instant de la lutte des classes en Israël. Le capitalisme israélien est très puissant.

Q : Oui, mais l’écart se creuse là-bas entre les riches et les pauvres. Il commence à y avoir une vraie misère, surtout chez les juifs d’Orient, non ?

R : Le niveau de vie des pauvres en Israël est encore supérieur à notre niveau moyen ici.

Q : Que pensez-vous de l’attitude actuelle des pays arabes vis-à-vis de la Palestine ?

R : Nous considérons tous les pays arabes comme nos ennemis, peut-être encore plus qu’Israël. C’est une catastrophe de n’avoir aucun, aucun régime démocratique dans les pays arabes. Nous soutenons les révolutionnaires des pays arabes. Nous devons abattre ces régimes pourris.

Q : Quelles formes doit prendre, à votre avis, la résistance contre l’occupation ?

R : La lutte armée, pour l’instant du moins, ne peut conduire qu’à des échecs. Il faut revenir à la forme de lutte qui était celle de la première Intifada, mener une résistance non violente, créer des comités populaires. Pour cela, il nous faut une direction démocratique qui prenne des décisions collectives, en finir avec la personnalisation du pouvoir. Un tel leadership saura parler au monde et coordonner notre action avec la vraie gauche israélienne. Et puis il faut aussi changer notre mode de vie, cesser de dépendre d’Israël pour tout, élever des poules et cultiver des tomates dans nos jardins.
Entretien avec Dr. S., membre du Fatah

Dr. S. gynécologue, députée du Fatah (au scrutin de liste national) au nouveau Conseil législatif. Elle était auparavant secrétaire de la section locale du Fatah (à Hébron). Elle nous reçoit, voilée, avec son mari, chirurgien orthopédiste.

Q : Quelles mesures le Fatah prend-il pour se renouveler après l’échec des élections ?

R : Le vote a été une punition pour nos erreurs. Le processus de paix, qui était notre œuvre, n’a conduit nulle part, et c’est ça que les gens ont voulu sanctionner. Et aussi la corruption, mais vous devez savoir que ceux-là sont en ce moment devant les tribunaux.

Q : Je ne suis pas là depuis longtemps, mais j’ai souvent entendu dire que le Fatah refuse de reconnaître le résultat des élections.

R : Pas du tout ! Il y a deux partis avec deux programmes différents, c’est tout. Ce sont les Israéliens qui poussent au conflit.

Q : Pardon d’insister, mais est-ce que le Fatah ne cherche pas à exploiter les difficultés actuelles pour pousser le Hamas dans le mur ?

R : Mais non ! Les employés dont les salaires ne sont pas payés depuis trois mois, ce sont tous des gens du Fatah !

Q : À votre avis, que va-t-il se passer ?

R : Le plan d’Olmert est de nous écraser, de nous pousser à partir. C’est un plan de transfert sur le mode sournois. Nous devons refaire l’union pour remettre l’économie en route.

Q : Mais un gouvernement d’union entre des gens qui ne sont d’accord sur rien...

Le mari intervient : Vous savez, les partis représentent au plus 30% des Palestiniens. 70% sont politiquement neutres. Si le processus de paix se remet en marche, ils reviendront.

R : La proposition des prisonniers est bonne et elle est largement acceptée. Le Hamas l’a refusée, mais ils n’ont que des slogans, pas de programme. Ils ne sont pas réalistes. J’ai posé des questions au ministre de la Santé sur des questions importantes : les chimiothérapies, les dialyses, les greffes. Il n’y connaît rien. Ce ne sont pas des professionnels.

Q : Mais quand le Fatah était au pouvoir, qu’est-ce qu’il a fait sur ces questions ?

R : Quand nous avons commencé, il n’y avait rien. Nous avons construit tout le système à partir de zéro. Maintenant, le Hamas a la tâche bien plus facile.

Entretiens conduits par Eric Hazan
 
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