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Diversité et Islam dans l’armée française
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10 juillet 2007 11:12
Extrait de l'interview :

Et la gestion de l’islam au sein des armées ?

Au niveau de l’Islam, je crois qu’il faut distinguer deux périodes. Les musulmans ont été présents dans les armées françaises dès le début de la conquête coloniale. Différents régiments coloniaux de tirailleurs et de spahis furent crées dès la conquête de l’Algérie en 1830. Leur création fut officialisée par ordonnances royales en 1841.

Etant sujets de l’Empire et non citoyen à part entière, leurs membres étaient souvent relégués et discriminés notamment au niveau des soldes et des conditions d’avancement et ce jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale.

Cette distinction est importante car à cette époque, la gestion de la diversité ethnique était un élément incontournable puisque les régiments étaient très homogènes d’un point de vue confessionnel. Par conséquent, cette donnée était d’un point de vue organisationnel et logistique plus facilement prise en compte par l’administration des armées.

Et aujourd’hui quelle gestion et quelles pratiques de l’islam au sein des armées ?

L’accroissement du nombre de militaires de culture musulmane a fait réapparaître avec force la question de la gestion du culte musulman au sein des régiments. Jusqu’à présent, l’institution accusait un retard certain par rapport à l’organisation de l’Islam puisqu’il n’existait pas d’aumônerie islamique alors que les autres cultes en disposaient.

En 2006, un premier aumônier militaire musulman désigné par le CFCM a été engagé et la Défense mobilise ses efforts pour poursuivre cette dynamique. C’est pour elle un enjeu majeur autant du point de vue du respect du principe de laïcité que pour la cohésion des troupes.

Mais, concrètement, il est difficile de répondre à cette question car l’armée est loin de constituer un bloc monolithique. Les expériences des militaires musulmans divergent nettement en fonction du corps d’armée (Air, Marine...) des spécialités des régiments (combat, transport...) et surtout des possibilités d’aménagement accordé par la hiérarchie ou qu’autorise le contexte opérationnel.

Il est évident que les possibilités de pratique ne sont pas les mêmes selon que le militaire se trouvera dans un espace confiné et contraignant tel qu’un sous-marin ou engagé dans une spécialité quasi-assimilable à un métier du civil (par exemple mécanicien dans l’armée de l’air).

D’un régiment à l’autre, la pratique n’est pas donc pas la même. Globalement les régiments facilitent la pratique du culte musulman (ration sans porc pour musulmans, double ration le soir pendant le ramadan). Au niveau des prières quotidiennes chaque régiment définit une marge de manoeuvre qui est plus ou moins importante. Néanmoins, les impératifs opérationnels demeurent dans tous les cas la priorité et ne peuvent en aucun cas être remis en cause par la pratique d’un culte, quel qu’il soit.

Est-ce que la question de la loyauté de ces militaires constitue un enjeu ?

Il faut d’abord préciser que la question de la loyauté ou de l’allégeance n’est pas l’apanage des militaires de confession musulmane. Elle est une constante dans l’histoire des militaires Elle s’est posée à d’autres périodes historiques, comme au début du siècle, lors de l’affaire des fiches du Général André qui, doutant de la loyauté républicaine de certains de ses officiers « trop croyant et trop fidèle au Vatican » à son goût, décida de les ficher secrètement afin de les écarter des postes importants de l’armée.

On peut également faire référence à l’expérience des soldats américains d’origine japonaise durant la seconde guerre mondiale, particulièrement après la bataille de Pearl Harbor. La suspicion envers la communauté asiatique était alors à son paroxysme et beaucoup furent internés durant plusieurs mois.

Aujourd’hui, il est clair que le contexte international est marqué par la menace de mouvements qui se réclament de l’Islam, la méfiance s’est donc déplacée vers ces groupes ethnoculturels. Aujourd’hui, malgré la suspicion que peuvent alimenter certains médias ou certains mouvements politiques autour de l’islam, il n’y a aucun problème concernant l’allégeance des recrues de culture musulmane. Sous l’uniforme, le sentiment d’appartenance à la Nation française est très fort et renforcé par la cohésion que développent l’esprit militaire et la poursuite des missions.

Propos recueillis par la rédaction

*Elyamine Settoul

Allocataire de recherche au Centre d’Etudes et de Recherches Internationales/Sciences Po.


L'interview complète : [oumma.com]
 
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